A Paris comme à Washington, c’est le
printemps : les primevères fleurissent dans les prés, le rossignol chante
dans les cerisiers en fleur, et les filles ont sorti leurs robes légères. A
Bagdad, c’est aussi le printemps : les missiles pleuvent, les bombes
explosent et il y a de l’hémoglobine sur le macadam. Forcément, dans ces pays
chauds, c’est pas le même climat que chez nous.
Visiblement, les journalistes télé
français n’ont pas retenu toutes les leçons du conflit de 1991. Ils ont eu beau
claironner sur tous les tons qu’on ne les y prendrait plus, la tentation a été
la plus forte : il faut montrer de belles images pour bien montrer qu’on
est au coeur de l’actu. Emblématique du phénomène : cette course entre
deux chars américains dans le désert irakien. C’est le degré zéro de
l’information : si c’était pour filmer le Paris-Dakar,
on avait qu‘à envoyer Gerard Holtz !
Chat va friter !
Les Belges, qui font partie du camp
de la paix, ont sorti ce week-end leur arme de rigolade massive contre la
guerre : Philippe Gelück. Le dessinateur a
littéralement trusté les colonnes du quotidien " Le Soir "
de Bruxelles, à l’occasion des 20 ans de son personnage fétiche :
" Le Chat ". Actualité oblige, Gelück
s’est livré à un lâcher de vannes explosives, à un tir de gags qui font mouche
avec autant de précision qu’un Tomahawk à guidage laser : dommages
collatéraux garantis sur les zygomatiques !
Mon préféré : " Pour
éviter que Saddam Hussein leur fassent le même coup que le Mollah Omar, la
première mesure des américains en Irak : confisquer toutes les
mobylettes ". Chapeau l’artiste !
Grève du zèle
Les soldats anglais qui ont
tragiquement trouvé la mort samedi dans une collision entre deux hélicoptères
ont été victimes de l’encombrement ahurissant du ciel d’Arabie généré par le
conflit en cours. Le trafic aérien y est si démentiel, qu’une veille de 14
juillet à Orly n’en donne qu’une faible idée.
J’en ai conçu un plan simple et
efficace pour lutter contre le bombardement des populations civiles. Je
m’adresse solennellement aux syndicats français et je leur suggère :
plutôt que de perdre du temps dans les cortèges de manifestants entre
République et Nation, pouvez-vous dépêcher séance tenante dans le Golfe
Persique nos contrôleurs aériens ? Avec eux aux commandes de la tour de
contrôle, la flotte de bombardiers U.S. devrait
rapidement être clouée au sol, et les enfants irakiens pourront continuer à
jouer dans les cours d’écoles sans se prendre une bombe sur le coin de la
tronche.
Mais où est donc passée la 51ème
Compagnie ?
Mal habillés, mal nourris, mal
équipés, avec le moral dans les chaussures et des ampoules aux pieds, les
soldats irakiens ont toutes les raisons de se rendre en masse. Abreuvés de
tracts en Arabe largués par avions, certains soldats irakiens ont estimé a
raison qu’il ne valait pas la peine de se battre pour un tyran qui leur tond la
laine sur le dos et qui leur casse les noisettes depuis de longues années.
Mais les experts du Pentagone y sont
allés un peu fort dans le perfectionnisme de la guerre psychologique, quitte à
devenir un chouia insultant, en indiquant aux
troufions irakien le mode d’emploi pour se rendre. Apparemment,
une reddition efficace, ça ne s’improvise pas : essayez donc de vous
rendre sans un bon mode d’emploi ! C’est aussi indispensable que pour
monter un meuble Ikea, ou que pour changer une roue sur une Xantia.
Impensable de songer à déposer les armes si on n’a pas une bonne notice
explicative traduite de l’anglais en arabe, avec des schémas explicatifs et des
précisions indispensables du genre : " avant de mettre vos mains
sur la tête, pensez à déposer au sol le drapeau blanc ".
Toutefois, si un de ces malheureux
devait essuyer un tir de M16 faute d’avoir lu correctement le mode d’emploi, il
pourra toujours essayer de s’adresser au service après vente de l’Oncle Sam : ça m’étonnerais qu’ils répondent aussi
rapidement que chez Darty.
Conventions de Genève ?
Les images des premiers prisonniers
de guerre dans les deux camps ont donné une fois de plus une idée de la
propagande et de la désinformation qui règne dans ce conflit.
Images des prisonniers
américains : certes apeurés (on se met à leur place), ils semblent
toutefois bien traités, et une voix off leur pose d’une voix douce des
questions sur leur identité dans leur langue maternelle, l’Anglais. Honteuse atteinte
aux conventions de Genève, selon Colin Powell.
Image des prisonniers
irakiens : parqués comme des bestiaux, assis à même le sable, un G.I. leur aboie des insultes dès que l’un d’eux bouge le
petit doigt. Ne parlant bien entendu aucun mot d’Arabe, le
" boy " chargé de surveiller les pauvres gars ne sait même
pas si l’un d’eux veut " prier " ou
" pisser " (sic).
Aucun commentaire du coté du
département d’état américain.
Oncle Bob.