Nous autres français, avons sans doute été récemment accaparés par des informations locales de la première importance, telles que la condamnation d'Alain Juppé ou la grève des remontées mécaniques à Val d’Isère. Aussi, n’avons nous quasiment pas été tenus au courant des événements de portée mondiale. Le dimanche 1er février 2004, avait lieu aux Etats-Unis le XXXVIIIème SuperBowl, la finale du championnat de football américain.
Petit rappel à l’attention des irréductibles gaulois : ne pas confondre le football américain avec le football dit " européen " (ce dernier étant appelé " soccer " outre-Atlantique). Pour l’américain moyen, le " soccer " est un sport de gonzesse. De fait, les américaines sont fort bien classées dans les compétitions internationales de football féminin. Le foot (européen) est également considéré comme un sport pour les " chicanos " et autres basanés moustachus originaires du sud du Rio Grande, un sport où on attend 120 minutes à espérer un but qui ne vient pas, bref un sport aussi chiant qu’une soirée Théma sur Arte. Ce ne sont malheureusement pas ceux qui on regardé Nantes-Auxerre la semaine dernière sur France 2 qui diront le contraire.
Le vrai foot, celui pour hommes, c’est le football américain. Les athlètes qui évoluent dans ce sport viril prennent en un match la dose de créatine qu’a avalé Zinedine Zidane pendant 3 saisons à la Juventus de Turin. Même le rugby à XIII semble plus proche de la GRS ou du patinage artistique que du football yankee. En résumé : c’est du brutal. Fin du rappel sportif.
Le SuperBowl, c’est l’événement télé de l’année aux Etats-Unis : 90 millions de téléspectateurs rivés devant CBS avec une bibine à la main et un paquet de cahouètes dans l’autre. Du coup, c’est là que ça devient intéressant, mais pour les annonceurs publicitaires, assurés de vanter efficacement leur camelote à un public potentiellement consommateur et gentiment décérébré. Les tarifs des écrans publicitaires pendant la mi-temps du SuperBowl atteignent des sommets : 2 millions de dollars environ pour 30 secondes ! A ce prix là, les annonceurs se permettent de réaliser des pubs aux budgets pharaoniques, souvent amusantes et créatives, qui ne sont parfois diffusées qu’une seule fois à cette occasion.
C’est donc LE moment où il faut diffuser une pub, pour être sûr qu’elle soit vue … Et cela, le front américain des anti-Bush l’avait bien compris ! Il avaient donc préparé un spot de 30 secondes destiné à être diffusé pendant la mi-temps, entre les spots pour Pepsi, General Motors, IBM, AOL et Phillip Morris, entre autres (la publicité pour les cigarettes, ainsi que la publicité politique, sont autorisées aux USA). George W. Bush s’y prenait une nouvelle baffe concernant sa politique, en particulier sur son déficit budgétaire qui s’élève au dernières nouvelles à 521 milliards de dollars, soit plus que le PIB annuel du Brésil. Rappel : en quittant la Maison Blanche en 2001, Bill Clinton laissait un confortable excédent.
Mais cette pub, les téléspectateurs de CBS ne l’ont pas vue. Les patrons du plus grand réseau de TV américain, soucieux de ne pas s’attirer les foudres de la Maison Blanche, n’en ont pas voulu. Comme par hasard, l’administration Bush prépare en ce moment une loi concoctée sur mesure pour eux, assouplissant les règles de diffusion et de cumul dans les médias.
Le truc que CBS n’a pas pu interdire en revanche, c’est le tété de Janet Jackson. Toujours pendant la mi-temps du SuperBowl, outre les pubs à grand spectacle et à gros budget, c’est la tradition de faire venir des pointures du show-biz pour pousser la chansonnette. Cette année, c’étaient au tour de Justin Timberlake (l’ex de Britney Spears, pour ceux qui n’ont pas lu " Voici "), accompagné de la petite sœur de Michael Jackson, probablement soucieuse de faire oublier les frasques pédophiles de son aîné. A eux de faire le spectacle : bingo !
Ce que n’avaient pas prévus les organisateurs de ce show réglé au quart de poil, c’est que le roploplo de la chanteuse black, entièrement remodelé à la silicone, se fasse la malle en plein pendant sa prestation scénique. Sous l’effet de la force centrifuge et d’une chorégraphie pourtant savamment travaillée, le nibard rebelle fut éjecté du fourreau de cuir noir façon sado-maso qui lui tenait lieu de soutif. Stupeur de la part de la frange la plus conservatrice des téléspectateurs de CBS, qui n’avaient probablement pas vu un sein depuis longtemps, et qui n’ont certainement pas lu le numéro du magazine pour homme FHM, où on constatait de visu que Janet Jackson est bien une femme, malgré une forte ressemblance avec son frère (pour ce dernier, le pronostic semble plus réservé).
Suite à cette affaire gravissime, les dirigeants de CBS se sont confondus en excuse les plus plates auprès du public de la chaîne. En revanche, aucune excuse pour la non diffusion du spot anti-Bush. Pas d’excuses non plus envers les sympathiques fumeurs de cannabis, victimes collatérales d’un autre spot, au contenu tout aussi politique, mais qui lui n’a pas été censuré. Dans ce spot, qui a bien été diffusé pendant la mi-temps du SuperBowl, les fumeurs de joints étaient assimilés à des terroristes du réseau Al-Qaïda. Il est vrai que ce spot était payé par l’administration américaine dans le cadre de la lutte contre la toxicomanie. Sans commentaire.
Voici donc le moment de conclure cette chronique en faisant un acte militant. Pour protester contre la tartufferie américaine en général et contre George Bush en particulier, allez donc signer la cyber-pétition montée par les promoteurs de la pub anti-Bush, pour protester contre la censure de CBS :
http://www.moveon.org/cbsJe sais, c’est juste pour les emm…, mais ça fait tellement du bien.
Oncle Bob.
Dernière minute - je colle une authentique dépêche AFP :
Sein nu de Janet Jackson: un Américain porte plainte et espère être indemnisé
WASHINGTON (AFP) - Une employée de banque américaine a lancé une plainte en nom collectif, espérant être indemnisée de plusieurs millions de dollars après avoir subi le spectacle " scandaleux " du sein nu de Janet Jackson, brièvement exhibé à la télévision.
Terri Carlin, 47 ans, qui vit dans le Tennessee (sud), explique dans sa plainte agir " au nom de tous les Américains qui ont assisté au comportement scandaleux " du chanteur Justin Timberlake. Ce dernier avait arraché le bustier de Janet Jackson lors du spectacle de mi-temps de la finale du Super Bowl, le championnat de football américain dimanche, dévoilant son sein nu à près de 90 millions d'Américains devant leur poste.
La plainte, déposée mercredi, réclame des dommages compensatoires et punitifs " maximum " auprès de Timberlake et Jackson, ainsi qu'auprès de la société Viacom, propriétaire de la chaîne CBS qui a diffusé le spectacle, et de la chaîne MTV, productrice du spectacle de la mi-temps.
La plainte accuse les stars et les producteurs de l'émission d'avoir prévu " des actes à caractère sexuellement explicite, dans le but de s'assurer de la publicité et ainsi d'accroître leurs profits ".
Les deux stars, comme CBS et MTV, se sont excusées à plusieurs reprises pour ce que le chanteur a qualifié d' " incident de garde-robe ". L'affaire a pris des proportions énormes aux Etats-Unis, où le spectacle d'une poitrine féminine est inédit à la télévision (hors câble).
Dans ce contexte, Janet Jackson a été écartée de la liste des présentateurs de la cérémonie des Grammys dimanche, qui récompensera les meilleures productions musicales de l'année.